Le Havre, an 1872.A deux pas de la mer, dans le quartier des pêcheurs, quelques badauds observent avec effarement une vingtaine d’énergumènes en blouse blanche qui s’écharpent joyeusement sur un terrain vague. Ils courent comme des dératés, se cognent dessus comme des sauvages, s’engloutissent dans de furieuses mêlées dont ils ressortent avec de grands rires de gosses. Objet de cette bagarre générale: une vessie de porc remplie de sciure, poussée avec les pieds, saisie avec les mains, que les hurluberlus convoitent comme s’il s’agissait d’un nouveau graal...Qui sont ces allumés du terrain vague?... Comment imaginer que se joue à cet instant un événement historique? Car c’est ainsi que débarqua pour la première fois sur le continent, le football...Nostalgiques d’un sport déjà plus que balbutiant dans leur pays natal, quelques universitaires britanniques, employés dans le port du Havre, composent l’ossature du futur club. Avec à leur tête, Georges Washington, un pasteur anglican flamboyant, fervent adepte du “dribbling” et enseignant dans un lycée de la ville.A partir de cette histoire authentique -qui fait du Havre Athlétic Club, le club doyen français pour le football et le rugby- l’auteur tisse une trame romanesque échevelée autour de la bande du terrain vague, une sorte de Far West du sport, avec ses pionniers (Frederick Field Langstaff), ses belles de saloon (Anaïs la rousse), ses fausses ingénues (lady Shelley) et ses notables extravagants (lord John Edouard Flagminton). Et quand un “Frenchy” surdoué (Godefroy Pouillès) se mêle de défier les Anglais sur leur propre “ground” et de s’intégrer à l’équipe, l’affaire sportive bascule côté coeur. Mais qu’importe! Rien d’autre ne compte aux yeux de Georges Washington que de remporter le match opposant son “team” local à l’équipage de la flotte anglaise ancrée dans le port pour la visite du président Thiers. Historiquement, la première rencontre de football jamais disputée en France. Enfin, football, c’est vite dit... “Un jeu de sauvages que nous avons réussi à discipliner” se vantent les Anglais, mais dans Le Havre de 1872, tous les coups sont permis.