L'entraineur français : le coupable idéal ?
L’entraîneur français est-il moins bon que ses homologues étrangers ? La Ligue 1, récemment surnommée La Ligue des Talents, est-elle si ennuyeuse à regarder ? En formulant autrement : d’où ...
L’entraîneur français est-il moins bon que ses homologues étrangers ? La Ligue 1, récemment surnommée La Ligue des Talents, est-elle si ennuyeuse à regarder ? En formulant autrement : d’où viennent les mots du football français ? Mourad Aerts s’est posé la question et tente, à travers les interviews de divers acteurs passés et actuels du championnat de France, d’y répondre. Et d’aller plus loin que les clichés…
Mourad Aerts entame son livre par une rétrospective histoire des institutions de la Fédération française de football, ainsi que de la mainmise sur le système par un homme : Georges Boulogne. Ou, comme le surnomme l’auteur, le « gourou suprême ». L’homme, omniprésent des années 1950 à 1980, a véritablement fondé le modèle de formation à la française, qui a posé les bases de la pensée au sein du football français. La rétrospective est certes courte, mais primordiale pour mieux appréhender la suite de l’ouvrage.
Et quelle suite ! L’ouvrage est composé de neuf interviews, avec différents acteurs passés par le championnat de France – pas forcément le plus haut niveau pour tous, mais chacun a un vécu avec le terrain ou les institutions.
Le premier des intervenants est Pascal Moulin, ancien footballeur français ayant côtoyé les basses divisions du championnat de France, l’homme est aujourd’hui entraîneur à Jura Sud, en National 2. Son regard sur la formation diplômante des entraineurs français est extrêmement critique, lui qui a dû batailler pour s’inscrire au BEPF. Cette formation est un passage obligé pour entraîner au niveau professionnel et malgré ses vingt ans d’expérience en tant qu’entraîneur, Pascal Moulin s’en est vu refuser l’entrée trois fois. Un comble, quand on sait que les anciens joueurs de Ligue 1 ont certains passe-droits… Grâce à cet échange, on comprend mieux le blocage de certaines institutions françaises…
Sans entrer dans les détails de chacun des échanges, Mourad Aerts parle du « jeu » avec Alain Casanova et Olivier Dall’Oglio, identité de jeu et identité régionale avec Frédéric Hantz, entraînement et comportement dans le vestiaire avec Edouard Cissé, économie et point de vue de président avec Jean-Pierre Rivière, expérience et évolution du football avec Reynald Denoueix, ainsi que supportérisme et jeu avec Pierre-Marie, un supporter nantais.
Chaque interview est l’occasion pour Mourad Aerts de parler des clichés, de cette Ligue 1 qui peut sembler ennuyeuse, de ces entraîneurs qui peuvent paraître frileux, etc. On ressent l’envie des intervenants d’expliquer leur choix, de pouvoir exprimer leurs idées et de montrer qu’il faut regarder plus loin. Tous se plaignent d’ailleurs du retard que peut avoir le football vis-à-vis d’autres sports – je pense notamment au préparateur mental, encore mal vu par beaucoup de joueurs et d’entraîneurs, mais qui commence à s’imposer dans les staffs de Ligue 1.
La réponse à la question posée par le livre est évidemment oui, l’entraîneur français fait un coupable idéal. Mais l’entraîneur français est bien souvent l’arbre qui cache la forêt. Ce livre apporte donc, non pas des réponses gravées dans le marbre, mais un ensemble de réflexion pour comprendre les maux du football français. Et se poser les questions, c’est déjà chercher à avancer.
Petit point positif, Mourad Aerts demande en fin d’ouvrage à Jean-Marc Furlan s’il est d’accord avec certaines remarques des acteurs du livre. Un petit échange léger, qui permet la confrontation des points de vue.