Bill Buford est journaliste. À l’origine, il n’aime pas le football. C’est un intellectuel qui va rencontrer une partie de ceux qui composent cet univers footballistique.
Comment peut-on faire du religieux sans tomber dans le fanatisme ? En étudiant les hooligans anglais, Bill Buford va tenter de répondre à cette question en la transposant au monde du football. Comme dans toutes les religions, il y a diverses échelles de croyances : ceux qui suivent ça de loin ; ceux qui vont la pratiquer de temps en temps, sans se questionner sur la portée de leurs actes ; et les fanatiques. C’est cette dernière catégorie qui sera le centre du livre.
L’action commence en 1985. Bill Buford côtoie Mick, l’un des premiers protagonistes que l’on rencontre dans ce livre, une rencontre haute en couleur et en bières. C’est lui qui décide Bill Bord à partir en voyage organisé à Turin pour assister à la rencontre de Coupe des Champions face à la Juve. L’auteur s’envole donc pour Turin, assister à une rencontre pour laquelle il n’a pas de billet, en compagnie de gens qu’il ne connait pas.
Et ce qui devait arriver arriva : échauffourées, bagarres, vols… Tous les clichés de violence y passent.
« Ils étaient tous là, en équilibre sur un pied, occupés à balancer l’autre jambe d’arrière en avant, et cela m’aurait peu coûté de venir au secours du garçon. Mais je n’ai rien fait. Je crois que cela ne m’est même pas venu à l’idée. »
Bill Buford plonge au cœur de la violence, mais va aussi découvrir toute une facette dont il ne pouvait imaginer l’existence. Au-delà de la violence dans les stades et autour de ceux-ci, l’auteur est fasciné par le racisme et la présence du National Front, parti néonazi qui cherche à étendre son influence politique et qui se sert de ces hooligans pour recruter de nouveaux adhérents.
Bill Buford est-il en train de vivre une virée au cœur de l’Enfer ?
Chapitres
- Une gare près de Cardiff
- Manchester
- Turin
- Sunderland
- Manchester
- Bury St Edmunds
- Cambridge
- Dawes Road, Fulham
- Düsseldorf
- La Sardaigne
Avis de la rédaction
Premièrement : ceci n’est pas un roman. On pourrait le croire, au regard des personnages et des évènements cités dans ce texte, mais il n’en est rien. Tout est vraisemblable et véridique.
Au-delà de l’aspect religieux et du fanatisme, Bill Buford nous offre une étude formidable sur la foule. Car l’auteur étudie ses sujets, il les observe et en tire des conclusions. Il truffe son ouvrage de références : à la Révolution française ; à la Terreur ; à la guerre… Devant les actes de ses camarades de voyage, il s’interroge : doit-il faire pareil ? peut-il faire pareil ? Et surtout, comment est-il perçu par ceux qui l’observent ? Car, désormais, il fait partie de ce groupe violent, de ce groupe qui casse, qui hurle, qui vocifère, qui boit.
« Je me souviens d’avoir pensé, je suis allé trop loin. Je me suis laissé devenir l’un d’entre eux, et me voilà en train de me faire taper dessus par un policier que j’engueule, avec les supporters derrière moi qui m’encouragent – les supporters derrière moi ? Par les mille supporters derrière moi : je suis en tête d’une foule, parmi les leaders. Mais à ce moment-là il s’est passé quelque chose derrière nous – quelqu’un a traversé la rue – et les deux longues colonnes, les supporters de l’United d’un côté, les supporters de Tottenham de l’autre, ont momentanément convergé, et une clameur s’est élevée. »
Ce qui est incroyable, c’est que l’on ne peut détacher les yeux de ce livre : il transpire l’intelligence. C’est un livre vrai, sur une fange d’une population qui a longtemps fait la Une alors qu’on ne la connait pas si bien que ça. C’est un livre qui se veut être une étude sur les hooligans et qui termine en introspection. C’est un ouvrage dur, pourtant si facile à lire. L’auteur a une plume formidable. Et quand une plume est au service d’un propos intelligent, ça donne un ouvrage formidable.