Joue-là comme Saint-Ouen sur Seine [Critique]

Saint-Ouen est une ville investie par le foot depuis plus d’un siècle. Des très jeunes qui tapent le ballon dans les cours des cités en passant par les collèges et les lycées jusqu’au mythique stade Bauer et à l’Union Sportive Multisections Audonienne, ce livre rend hommage à cette population dont le cœur bat au rythme du foot. Mais ici, ce monde en short et en sueur ne parle pas que de sport, mais de citoyenneté, pas que de classement final, mais de société, pas que de passes décisives mais d’humanisme. Les photographes Meyer et Denis Bourges, du collectif Tendance Floue portent dans ce livre foisonnant, un regard d’auteur résolument neuf et sensible sur Saint-Ouen, à contre-courant de la représentation stéréotypée souvent à l’œuvre sur ce territoire. Un regard qui se veut le plus ouvert possible, en réponse à la richesse et à la diversité des situations rencontrées. Un regard pluriel, explorant un spectre large de styles, de la photographie documentaire à la photographie contemporaine. Accompagnant ces images singulières, des images d’archives, des clichés pris par les enfants des quartiers sous le regard bienveillant des deux photographes, émaillent l’ouvrage. L’écriture de Rémy Fière, qui vient en appui du travail photographique, se veut variée et protéiforme, légère plutôt que plombée, multiple plutôt que monotone. L’arsenal déployé mélange les genres littéraires et les archives retrouvées, les portraits et les entretiens, les rencontres et les flâneries, les phrases courtes qui résument des parcours et les citations qui rappellent les slogans. Des extraits de textes écrits là encore par de jeunes écoliers de Saint-Ouen viennent cimenter l’ensemble et sceller le rapprochement entre la réalité et la vision qu’en ont les enfants, jamais si éloignés finalement de cette poésie naïve et brute qui entoure le monde du football.